Saucisson sec artisanal, saucisson fait-maison, saucisson fabriqué en France, saucisson aux épices … Comment s’y retrouver alors que tous semblent être des “produits du terroir fabriqués en France” ? Après avoir lu plus attentivement les étiquettes de certains saucissons, nous nous sommes posés plusieurs questions.
Pourquoi y’a t’il une liste d’ingrédients à rallonge ? Comment le talc, utilisé habituellement dans les produits cosmétique, se retrouve dans un saucisson ? Comment est fabriqué le saucisson industriel par rapport au saucisson sec artisanal ?
Tout comme pour le jambon, les industriels du saucisson cherchent à produire un produit standardisé pour “satisfaire” les demandes des consommateurs. Saucisson longiligne, régulier, couleur bien rouge et aspect poudreux sur le dessus sont de mise en supermarchés. Pourtant, de plus en plus de personnes se penchent sur les étiquettes des saucissons. Ils apprennent à reconnaître un vrai bon saucisson fermier. Prêt à tout savoir pour le prochain apéro ?
Chez l’artisan : on connaît l’origine et l’alimentation des porcs. Soit parce que l’artisan les a vu naître. Il les a élevés, soit parce qu’il les a achetés à un très bon éleveur de cochon. Dans un bon élevage, les cochons ont le temps de grossir. Ils sont nourris avec des aliments naturels. Ils ne sont pas traités aux antibiotiques ou autres médicaments à titre préventif..
Pour faire du saucisson, on sélectionne en général ⅔ de maigre et ⅓ de gras de porc. Le maigre est pris dans l’épaule et dans le jambon, et le gras est pris dans la bardière et dans la poitrine du porc. Bien sûr, plus la viande est de qualité, plus le saucisson va avoir un goût unique et développé, une texture ferme et fondante.
Dans l’industrie : on ne connaît rien du cochon, pas même l’origine. Comme nous l’avons expliqué dans notre article sur le jambon, il est pratiquement impossible de connaître l’origine des cochons industriels. Ceux-ci sont baladés au grès des coûts que vont payer les industriels sur le marché international du porc. De la naissance à l'abattage, les cochons vont passer de pays en pays. Là où réaliser une étape spécifique coûtera le moins cher.
Il est donc encore moins possible de savoir avec quoi les cochons ont été nourris, où comment ils ont été élevés… On se retrouve avec une viande remplie de produits chimiques, de conservateurs et qu’une qualité moindre dont on est juste sûrs que c’est bien du porc.
Pour faire du saucisson, on n’utilise pas seulement les morceaux recommandés. Il faut que cela coûte le moins cher possible. Les industriels ajoutent des morceaux moins nobles pour faire de la quantité, et les moins scrupuleux n’hésitent pas à mal trier la viande et à laisser s’y glisser quelques morceaux d’os, de cartilage et surtout, bien plus de graisse que nécessaire.
Une fois la viande sélectionnée, pour l’artisan et l’industriel, vient le temps de hacher la viande et le gras. En plus ou moins gros morceaux selon le type de saucisson voulu, et de les mélanger aux épices, c’est ce qu’on appelle la mêlée. Et c’est cette étape qui fait une grosse partie de la différence entre un saucisson industriel et artisanal.
Pour l’artisan c’est simple, il ajoute des épices, du sel, du lactose et quelques fois du vin rouge pour apporter une saveur originale à son saucisson, et cela s’arrête là.
Pour l’industriel, la liste est environ 3-4 lignes plus longue lorsque l’on regarde la composition du saucisson. Dextrose (qui n’est autre que du sucre), conservateurs, nitrites de sodium (qui va donner un saucisson bien rouge), carbonate de calcium (élaboré à partir de craie ou de coquillages) et talc.
Autre différence, le paysan charcutier traditionnel va hacher assez grossièrement son saucisson, ce qui lui donnera la texture parfaite. Chez l’industriel, afin que le volume important de gras passe inaperçu, le porc est haché beaucoup plus fin.
Sauf exception, on retrouve du lactose dans tous les saucissons. Le saucisson étant une viande à la base crue qui va fermenter. Elle va développer des bactéries. Ces bactéries sont les vrais productrices artisanales du saucisson. Ce sont elles qui lui donnent cette saveur incomparable qui vous fait vous languir du prochain apéritif.
Mais bien sûr, leur prolifération doit être contrôlée. Les ferments lactiques (lactose) sont un ingrédient naturel. On les retrouve dans nos yaourts par exemple. Ils permettent une bonne fermentation du saucisson en lui donnant une base acide qui permet de“nourrir” les bonnes bactéries tout en contrôlant leur prolifération. Cela évite également la prolifération de bactéries moins désirables.
Cet effet est aussi apporté par le sucre, que certain n’hésitent pas à mettre en grosse quantité (c’est d’ailleurs le 4ème ingrédient de notre saucisson test), pour que le saucisson fermente plus vite et soit prêt à la consommation au bout de quelques jours à la place de quelques semaines.
Après le hachage, le mélange va être mis sous boyau pour donner une forme au saucisson et le faire sécher.
Chez l’artisan : On prend tout simplement le boyau naturel (qui est nettoyé avant) du cochon. On forme les saucissons en refermant avec de la ficelle. La peau du saucisson de notre éleveur charcutier est d’ailleurs un élément essentiel de la saveur de notre saucisson, ne la retirez pas !
Dans l’industrie : On prépare du faux boyau synthétique, qui coûte bien moins cher, à base de collagène ou cellulosique (non vous ne rêvez pas, on parle bien de cellulose, que l’on retrouve notamment dans la peinture, dans le vernis et le papier..). Et surtout on le ferme avec des agrafes en métal, il est donc assez reconnaissable.
Manger ces 2 types de boyaux n’est pas spécialement recommandé, autrement dit, si vous lisez en tout petit “Enlever la peau avant de consommer”...fuyez !
Une fois toutes les étapes réalisées, dans les 2 cas, le saucisson va être placé dans une étuve à 20-25°C pendant 5 à 10h. C’est à ce moment que les ferments vont agir et les bactéries vont commencer à se développer.
Cette étape d'étuvage dure plus ou moins longtemps selon le taux de sucre et de lactose qui ont été ajoutés au saucisson. Plus il y en a, moins le temps d’étuvage et séchage va être long puisque les bactéries vont être boostées artificiellement.
Pour un saucisson artisanal, le séchage dure normalement environ 6 semaines. Chez les industriels on est plus proches de 7 à 15 jours.
Durant le séchage, le saucisson va se déshydrater et développer ses saveurs particulières. Comme le saucisson industriel n’a pas le temps de sécher, il n’a donc pas de goût. On lui rajoute une tonne d’épices et d’exhausteurs de goût pour rattraper le tout.
Durant le séchage, le saucisson artisanal développe une flore microbienne spécifique, comme certains fromages qui va tendre sur le blanc grisé. Les bonnes bactéries dont nous avons parlé précédemment sont responsables de cette jolie robe.
Le saucisson industriel lui, est recouvert de poudre blanche, talc, carbonate de calcium etc. Cette technique donne l’illusion -ratée- que les bactéries se sont développées pendant plus longtemps que quelques jours.
Nous avons réalisé quelques photos du saucisson sec de la Maison Couavoux et d’un saucisson test “qualité supérieure” acheté autour de 4,50€. La différence est flagrante lorsque l’on regarde le fleurage et la couleur des tranches. Quant à leurs saveurs, nous vous laissons deviner... !
A force de vouloir toujours payer moins cher et aller plus vite, les industriels de la viande finissent par proposer un produit qui n’a plus que le nom de saucisson. Entre additifs, conservateurs et autres produits ajoutés, nous ne sommes plus conscient du goût que devrait avoir le vrai saucisson. Et pas sûr que ce que nous mangeons soit vraiment bon pour notre santé...
Des producteurs et artisans charcutiers essayent tout de même de faire perdurer la tradition en élaborant du saucisson sec artisanal simple et savoureux. C’est le cas de la Maison Couavoux, et de pleins d’autres paysans ou artisans passionnés.
En conclusion, découvrez notre infographie qui compare le saucisson industriel et le saucisson artisanal :
À la une
Découvrez également ces articles
article est très bien fait. C'est clair, malgré la complexité, le dosage et le rôle des différents ingrédients qui entrent dans la fabrication du saucisson.
Néanmoins ça manque d'information sur les modes de fabrication artisanale.
Merci pour ces informations. Néanmoins je suis surpris de vos commentaires sur la cellulose, sucre végétal parfaitement naturel, présent dans la majorité (l’intégralité ?) des végétaux consommés.